Et, si l’IA nous permettait enfin de faire ce qui était impossible avant en éducation ?

J’écoute le balado Mon Carnet depuis de nombreuses années. C’est même devenu une habitude qu’on partage en couple : il n’est pas rare que je dise à mon conjoint « N’écoute pas Mon Carnet cette semaine, garde-le pour la route vers le chalet. » Ça tombe bien, le trajet dure une heure, juste le temps parfait pour écouter un épisode en entier.

Dimanche dernier, le 30 mai, c’est la chronique de Stéphane Ricoul qui m’a particulièrement marquée. Il y parlait du désenchantement face à l’IA en entreprise, mais aussi de cette idée qui m’a marquée : plutôt que d’utiliser l’IA pour refaire ce qu’on faisait déjà, pourquoi ne pas s’en servir pour réaliser ce qui était impossible jusqu’ici ?

Je travaille dans plusieurs milieux, surtout en éducation, et depuis quelque temps, je sens une forme de désillusion pointer le bout de son nez. Ce n’est pas une désillusion explosive ou dramatique, mais plutôt un genre de fatigue, de doute. Une petite voix intérieure qui murmure : « Finalement, c’est juste ça l’IA ? »

La courbe de Hype de Gartner

Ce que décrit Stéphane Ricoul dans sa chronique s’inscrit dans ce qu’on appelle la courbe de Hype de Gartner : un modèle qui illustre les différentes phases d’adoption d’une nouvelle technologie. Au début, on est dans l’excitation totale : les promesses pleuvent, les attentes sont immenses ! C’est la phase du « sommet des attentes surdimensionnées ». Puis, vient le fameux « creux des désillusions » : les résultats sont moins spectaculaires que prévu, les limites apparaissent, on doute. Ce n’est qu’après, pour ceux qui persévèrent, qu’on atteint ce qu’ils appellent le « plateau de productivité », là où la technologie trouve vraiment sa place.

https://www.gartner.fr/fr/methodologies/hype-cycle

Et, en ce moment, en éducation, je crois qu’on est proche (ou déjà) dans cette pente de désillusion.

« Est-ce que ça peut faire mes présentations à ma place ? »

Depuis que je forme et j’accompagne des gens sur l’intelligence artificielle, une phrase revient constamment, presque comme un réflexe :

  • « Est-ce que ça peut faire mes présentations à ma place ? »
  • « Est-ce que ça peut corriger à ma place ? »
  • « Est-ce que ça peut générer mes plans de cours à ma place ? »

Et, honnêtement, je comprends ce réflexe. Ces tâches prennent beaucoup de temps et d’énergie. C’est normal de vouloir les confier à un outil qui peut les faire plus rapidement. Dans certains cas, automatiser, c’est ce qui permet de souffler un peu ou de se concentrer sur d’autres aspects plus importants de notre travail.

Mais… si on s’arrête là, on rate peut-être l’essentiel. C’est là qu’on tombe souvent dans la désillusion. Car l’IA ne fait pas toujours à notre place… et souvent pas mieux!

Faire mieux… ou faire autrement ?

Le mot qui me dérange, c’est le « à ma place ». Je n’ai pas envie que l’IA prenne ma place.

Ce qui m’a toujours motivé dans l’intégration du numérique — et encore plus avec l’IA — ce n’est pas tant de remplacer, mais d’augmenter ce qu’on fait de mieux. D’ouvrir de nouvelles portes. D’élargir les possibilités. En fait, ma vision tient en une phrase : utilisons la technologie pour amplifier ce qu’on fait de mieux, mais surtout, pour faire ce qu’on ne pouvait pas faire avant — des choses qu’on aurait crues irréalistes, trop longues, ou hors de notre portée sans ces outils.

Quand l’IA permet l’impossible (ou presque)

Des enseignants commencent déjà à explorer des pistes qui auraient semblé impensables il y a encore peu de temps. Je pense à cette enseignante de math qui, grâce à des outils d’IA, a réussi à différencier ses exercices en fonction des passions de ses élèves — l’un parle de planche à neige, l’autre de pâtisserie, le troisième de jeux vidéo. Résultat : plus d’engagement, plus de motivation. Imaginez faire autant de version à la mitaine!

Ou encore à cet enseignant d’univers social qui, à l’aide d’un outil comme Napkin AI, conçoit des schémas pour sa feuille d’étude, avec une version adaptée pour les parents afin qu’ils puissent soutenir leur enfant à la maison. Ce n’est plus juste transmettre un contenu, c’est proposer une nouvelle façon de renforcer le lien entre l’école et la maison.

Je pense aussi à ces enseignants de science qui ont créé une version audio de leurs notes de cours avec NotebookLM, pour aider les élèves à réviser autrement. Ou qui transforment un croquis griffonné sur un bout de papier en illustration pédagogique claire et personnalisée. Pas juste pour faire joli — pour rendre un concept accessible, mémorable.

Ce n’est pas faire la même chose qu’avant, mais un peu plus vite. C’est autre chose. C’est nouveau. Et, c’est là que la magie opère.

Oui, il y a des limites avec l’IA générative… mais aussi des révélations. Je vois des usages qui transforment vraiment notre manière d’enseigner. Parce qu’ils nous obligent à réfléchir. Parce qu’ils nous invitent à expérimenter, ce qui nous aide à repenser nos pratiques.

Et c’est peut-être là que réside le véritable potentiel : dans cette phase d’exploration ou d’expérimentation où l’on accepte de ne pas tout comprendre, où l’on bidouille, où l’on teste. Où l’on se pose non plus la question « Que peut faire l’IA à ma place ? », mais plutôt « Qu’est-ce que je pourrais faire maintenant que je ne pouvais pas faire avant ? »

Choisir la Formule 1 en éducation

L’image de la Formule 1 coincée dans le trafic urbain, utilisée simplement pour aller au bureau dans les propos de Stéphane Ricoul m’a vraiment parlé. En éducation, on a entre les mains une technologie puissante. Si on se contente de l’utiliser pour générer des exercices à choix multiples ou pour rédiger nos courriels, c’est un peu comme conduire une Ferrari dans une ruelle. Bien sûr, il faut d’abord apprendre à conduire, et donc ce n’est pas mauvais de commencer par ce genre d’exploration.

Mais si on ose penser autrement, créer nos propres circuits, repenser la manière dont on enseigne, dont on apprend, dont on évalue… alors là, peut-être qu’on touchera vraiment à ce qui semblait impossible.

C’est un privilège, chaque fois que j’accompagne un milieu, de voir les gens se questionner, sortir de leur zone de confort, essayer, rater parfois, recommencer… et finir par réaliser des choses qu’ils pensaient impossibles. L’IA générative devient alors bien plus qu’un outil : c’est un levier pour repousser les limites de ce qu’on croyait impossible.


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